vendredi 21 mars 2008

Tibétains et Chinois: même combat contre l'oppression.

"Il faut, maintenant, faire pression sur Pékin", par Wei Jingsheng

Source : LE MONDE 19.03.08 14h26 (Traduit de l'anglais par Gilles Berton.© Global Viewpoint) pour les citations de Wei Jingsheng.

Tandis que se poursuit au Tibet ce que le dalaï-lama a qualifié de "génocide culturel", il est inacceptable que Jacques Rogge, président du Comité international olympique (CIO), refuse - en totale contradiction avec "l'esprit olympique" - de prendre position contre la répression actuelle menée par le gouvernement chinois à l'encontre des protestataires tibétains.
C’est une déclaration du célèbre dissident Wei Jingsheng (魏京生) aujourd’hui réfugié aux États-Unis. Et l’on notera que le Chinois longtemps opprimé par le régime de Pékin reprend l’expression « génocide culturel » chère Sa Sainteté le Dalaï-lama du Tibet, chef spirituel et temporel des Tibétains.

Ancien garde rouge, fils de hauts cadres communistes, Wei Jingsheng est l’un symbole du mouvement de revendications démocratiques en Chine. Dans les colonnes du quotidien Le Monde, on le voit s’exclamer, outré, : « Comment le CIO peut-il faire comme si de rien n'était alors que le sang coule dans les rues de Lhassa ? »

C’est la juste raison qui parle.

Pressenti à plusieurs reprises pour le Prix Nobel de la paix et récipiendaire en 1996 du prix Sakharov pour la Liberté de Pensée, ce contestataire chinois estime pour sa part que « les JO 2008 de laisser dans l'histoire un souvenir semblable à celui des Jeux de Berlin en 1936», si le Comité olympique continue de sa laver les mains du soulèvement tibétain tant dans la Région dite autonome du Tibet qu’en Chine même.

Wei Jingsheng s’exprime clairement en faveur de l’exercice d’une « pression » de la communauté internationale « sur Pékin » pour que le régime dictatorial chinois « stoppe la répression et respecte les droits humains fondamentaux », sinon, dit-il, « un boycottage sera considéré comme justifié. »

Se référant à la fuite en exil du Dalaï-lama en 1959, le dissident Chinois reconnaît que « les Tibétains rongent depuis longtemps leur frein sous l'oppression du Parti communiste chinois ». Il reconnaît, qui plus est, le « massacre » dont les Tibétains durent victime, un « massacre » qui précise-t-il selon ses propres mots « se poursuivit durant plus d'un an »Et d’évoquer « le chiffre de plus d'un million de morts tibétains. »

Nous rappelant qu’en 1989, Hu Jintao, chef actuel du Parti communiste chinois et « simple chef de province » à l’époque « réprima une nouvelle révolte à Lhassa en envoyant l'armée tuer des gens dans les rues », Wei Jingsheng nous remémore « ce qui se passa cette même année sur la place Tienanmen. »

Le régime communiste chinois massacre les Tibétains à Lhassa et les Chinois à Pékin.

A plusieurs milliers de kilomètres de distance, c’est la même répression sanglante, la même dictature qui est à l’œuvre. Pour le dissent chinois, « sans respect des droits de l'homme », les Tibétains comme « la majorité han chinoise » ne sauraient s’estimer à l'abri des « persécutions perpétrées par les autorités communistes ».

Et question « persécutions », Wei Jingsheng n’a guère été épargné: Condamné par le régime à 15 ans de prison, il est libéré en septembre 1993 mais arrêté peu de temps après en mars 1994 puis condamné à 14 ans. En tout, le dissident aura passé 18 dans les geôles de Mao consorts.
Aujourd'hui, dit-il, « la majorité han comprend que la lutte des Tibétains contre la tyrannie est aussi la sienne. »

Et, faut-il en être convaincu, c’est bien là la grande frayeur du régime de Pékin.

Quoi qu’il en soit, Wei Jingsheng observe que ses « années de militantisme en faveur de la démocratie en Chine lui « ont enseigné une chose : seule une pression internationale associée à une pression interne est en mesure de produire des résultats concrets. »

Et de voir dans l’immobilisme de Jacques Pogge un refus « tragique, car ces JO constituent un tournant dans l'histoire de la Chine moderne. »Avant de conclure que les J.O. « obligeront la Chine à montrer son vrai visage » et non plus le « visage grimaçant de la répression » d’après ses propres termes.

Depuis sa geôle, Wei Jingsheng écrivit à Deng Xiaoping et notamment en 1992, au sujet du Tibet, lettre où il remet en cause la suzeraineté de la dynastie Qing sur le Tibet.

Nul doute que Wei Jingsheng sait de quoi il parle et il parle vrai. Il est désormais grand temps de faire pression sur Pékin pour un Tibet libre et indépendant.

Libre Opinion.

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